Parfum de débauche... [Terminé]

-C’est tranquille ce soir…

Pour toute réponse, un lointain grognement sembla émerger des profondeurs de l’abysse dans laquelle s’était aveuglément jetée Jakob, et avec le sourire s’il vous plaît! La chute avait été longue, mais le rythme avait généralement gardé une constance régulière et assez rapide. Verre après verre, bouteille après bouteille, shooter après shooter, la sensation de descente avait été grisante. Et les occasions de trinquer avec les habitués de la place, ou pas, avaient été nombreuses. Jakob s’était d’abord montré généreux, offrant des verres à qui le voulait bien pour l’accompagner, mais en fin de soirée, lorsque offrir à boire lui parut indicible, comme toute autre parole, alors il abandonna. C’est à ce même moment que le fond du gouffre devint visible. Le rythme se brisa pour la première et dernière fois lorsque de son œil gauche, Jak vit sa fin venir, dure comme le roc et sans pitié. Verre rempli d’on ne sait trop quel brûlant liquide en main, il trinqua pour la dernière fois, à chouinjouinwouin, ou quelqu’un au nom qui s’y apparente, et bu d’une traite l’alcool que lui versait à présent bien à contre-cœur la serveuse. À cette heure, -tard mais pas SI tard, enfin, qui sait, Jak était assez perdu dans le temps en ce moment…- il ne restait plus qu’un membre du personnel et ce soir, c’est mademoiselle ici présente qui s’y collait. Le verre vide fut brutalement reposé et s’en suivit un bruit sourd, causé par la collision de la tête de Jakob avec le comptoir du bar. Et bang! Il avait atteint le fond de l’abysse qui, malgré ses trompeuses apparences, connaissait bel et bien une fin.

-Jak, tu devrais y aller, maintenant…

Cette fois, un ricanement guttural teinté de sarcasme remplaça le grognement. Jakob tourna la tête sur le côté, plaquant son oreille droite contre la surface de bois, et posa son regard sur la jeune femme, qui le regarda à son tour tout en astiquant un verre avec un chiffon.

-On te loue une chambre, si tu veux!

Il ferma l’œil. Elle soupira, le constata un court instant, reposa le verre derrière elle parmi d’autre et en sortit un autre de sous le comptoir qu’elle remplit d’eau glaciale. Elle le fit glisser jusqu’à Jakob. Il rouvrit paresseusement son œil gauche, aperçu le verre, et le repoussa mollement d’une main avant de refermer sa paupière. La serveuse s’empara alors du verre et, non pas sans hésiter une petite seconde, déversa d’un geste brusque la totalité de l’eau sur le visage de Jakob. La réaction fut immédiate, il se redressa, visage et cheveux en parties trempés. Interdit un moment, il demeura fixe, le dos bien droit, la paupière toujours close, les sourcils légèrement froncés et ses deux mains plaquées sur le comptoir. Puis, en partie remis, il passa sa main gauche sur son front pour décoller ses cheveux mouillés de sa peau humide. Il ouvrit l’œil, la serveuse s’était éclipsée afin d’aller servir une table dans un coin plus loin à laquelle un petit groupe était installé. Lorsqu’elle revint, il posa vivement quelques pièces sur le comptoir.

-Bon! Maintenant qu’jsuis remis… en partie…euh… donne encore… la même chose…
-Quelle même chose, Jak?
-Maaaais…la dernière même chose…!
-Très bien! Fit la jeune femme sans masquer son découragement et tout en se mettant à la tâche, prenant soin de prendre son temps, et plus encore.

Pendant ce temps, Jak attendait, dos au comptoir, il s’était accoudé contre la surface plane et observait les lieux d’un œil perdu.

-Tient.

Il se retourna, un verre était posé devant lui, mais ce ne fut pas ce qu’il vit en premier. Non d’abord, Jak faillit tomber de son siège, sursautant à la vue d’une personne assise à côté de lui. Ni vu venir, ni entendu, trop occupé à penser à… rien. Il l’observa un moment, encore un peu sous le choc de la surprise, et finalement, déclara à l’adresse de la serveuse :

-Un autre pour mon invité! Met le sur mon compte… finit-il en marmonnant. Mieux valait ne pas s’imaginer l’ampleur du compte de Jakob.

Il empoigna son verre et en but une longue gorgée, le reposa sans le lâcher puis, sans se presser, tourna la tête vers sa gauche, son œil bleu-vert rivé au visage de l’autre, scrutant, détaillant sans gêne, mais non pas sans lenteur, vu le parfum alcoolisé qui embrumait les esprits de Jakob en ce moment présent.

Un soir tranquille en effet… Even sirotait avec paresse son épais verre emplit d’un liquide sucré et alcoolisé tandis que ses yeux parcouraient la salle de long en large. Elle aimait suivre de loin ce qui se passait dans l’établissement, comme un spectateur devant un écran. Sa boisson, c’était son pop-corn : une façon comme une autre de faire passer le temps… Et de rendre la soirée plus agréable par la même occasion. Il y avait beaucoup de choses à voir lorsqu’on savait observer, et cela valait bien n’importe quel spectacle de foire. Par exemple, tout à l’heure, Amber la plantureuse dragonnière s’était disputée avec Nood parce qu’il la pelotait en public. L’homme avait joué les innocents sous les rires gras de ses amis et avait tenté d’attraper le bras de sa compagne, mais elle lui avait envoyé une gifle monumentale et était sortie du mess en fulminant. Tout cela était passé plus ou moins inaperçu à cause du tumulte habituel, mais Even avait suivit la scène en gardant sur le visage un petit sourire amusé. C’est qu’elle était pas commode, la petite Amber…

Ce petit accrochage n’était qu’un incident parmi tant d’autres, de ceux qu’Even regardait d’un œil absent. Seulement, à partir d’une certaine heure l’établissement commençait à se vider lentement… Privant ainsi la jeune femme de son spectacle favori. Elle restait donc seule, en face à face avec son verre. Ce soir là, elle faisait distraitement courir ses doigts sur la table en bois brut en finissant sa liqueur de poire. Il commençait à se faire tard, l’heure à laquelle elle rentrait habituellement. Mais pas ce soir... Son regard venait de se fixer sur le bar, où Jakob le borgne séduisant se laissait une nouvelle fois aller. Il buvait trop, c’était un fait assez connu des habitués du lieu. Pourquoi ? Pour oublier, comme dirait l’autre. Peut être était-ce par goùt, par plaisir ? Aucune importance. Une fois de plus, il était saoul, et la taverne allait bientôt fermer ses portes.

Lasse d’être seule, assise dans un recoin sombre et discret de la salle, la jeune femme se leva et s’approcha de l’homme de sa démarche chaloupée. Son pantalon moulant en cuir clair souleva quelques sourcils alors qu’elle se faufilait entre les quelques tables de l’endroit, et lui valu quelques discrets sifflements qu’elle repoussa d’un mouvement de la main, comme si elle voulait chasser quelque insecte. Ces gars là ne l’intéressaient pas… Et eux ne s’intéressaient à elle que pour une chose, dont ils ne pourraient d’ailleurs jamais profiter. Contrairement à ce que certains – surtout certaines – pensaient d’elle, Even ne se donnait pas au premier venu.

Lorsque enfin elle parvint au comptoir, elle du s’écarter pour laisser passer la serveuse qui revenait de la table des libidineux de derrière. Elle pestait après le borgne, celui qu’Even était venue voir. Le dragonnier était trempé : ses longs cheveux blancs dégoulinaient d’eau. En observant les sourcils froncés de la serveuse, la jeune femme compris ce qui venait de se passer et eut un petit rire. Cependant elle doutait que cela ai eut un effet vraiment efficace… Et elle en eu la confirmation lorsque Jakob commanda une autre boisson. Et ce n’était pas de l’alcool de débutant ! Parfait pour Even ça…

-Alors Jak, on tente d’oublier une belle colombe envolée, ou bien c’est ta sobriété perdue que tu fêtes ?

Le genre de phrase parfaite pour attirer l’attention d’un ivrogne ayant gardé un peu de fierté. Even ne le connaissait que de nom et de réputation, mais cela, ajouté à l’alcool qu’elle avait consommé, lui permettait de l’appeler par son surnom et d’être un minimum familière avec lui. Surpris par sa présence à ses cotés – on l’aurait été à moins – il ouvrit son œil de façon exagérée et commanda pour elle quelque chose à boire, ce qui fit sourire la jeune femme. Pourquoi pas ? Elle s’empara du verre que la serveuse avait posé devant elle en lui lançant un regard mauvais – auquel la jeune dragonnière avait répondu par clin d’œil provocateur – et le porta à ses lèvres pour boire une longue gorgée du liquide ambré. Hum, pas assez sucré à son goùt, mais parfaitement assez fort dans les circonstances actuelles. En reposant le verre sur le comptoir, elle regarda l’homme à coté d’elle et n’attendit pas qu’il ai finit de la reluquer avant de reprendre la parole.

-Ca m’étonne que tu sois seul ce soir. Tu n’as pas une amie avec laquelle partager ce délicieux moment d’égarement ?

Un soir tranquille ? Sûrement, un soir dont Goade ne pouvait pas profiter, par ailleurs... Tout était calme dehors, un petit vent frais soufflait sur Ene et quelques cumulus jesaisplustropquoi-us inondaient le ciel de leur apparence moutonneuse. Etrange, habituellement le soir l'azur était lisse et sans motifs, mis à part quelques étoiles aux bons présages et Dame Lune, toujours fidèle au rendez-vous. Quelques éclats de rires d'enfants raisonnaient des habitations coquettes, quelques ivrognes se baladaient dans les rues, récitant une fois de plus leur monologue du soir auquel ils étaient habitués.
Sinon, le silence.
Goade était restée paisiblement chez elle, sirotant un verre de jus de goyave (elle est saine elle ) en feuilletant un journal comportant plusieurs articles qui parlaient de la situation d'Ene, des dragonniers récemment embriguadés, des éventuels raids à venir... Ce dernier point fit hausser un sourcil à la brunette qui, bien loin d'être tannée d'organiser des raids, n'en n'avait même pas encore songé... Il faudrait qu'elle fasse son équipe bientôt. Le premier choix du lieu sur lequel elle se porta fut sans nul doute le désert aride. Kiam avait sûrement préparé ses plans, organisés toutes les hostilités possibles pour faire reculer les dragonniers, celà ne faisait rien : plus le défi était rude et plus ce serait amusant... Bien qu'elle ne soit pas kamikaze, la jolie Goade avait du sang fraîchement pimenté dans les veines et les aridités de la déesse de feu, avec de la bonne volonté et de l'entraînement, pourront être sans gravité.

Citation :: La belle Ene se situe désormais à 5920 mètres du sol. La situation est loin d'être critique mais nos dragonniers forts et entraînés sont prêts pour les éventuelles hostilités de la part des patrouilles volantes postées au dessus de Selenielle. Par ailleurs, certains chuchotent même que des raids seraient en cours de préparation... Assisteront-nous bientôt à la prochaine mission de nos sauveteurs? Sera-t-elle une réussite? Un échec?
[...]

-Ils parlent vraiment beaucoup trop, ces gazetiers...

Des coups retentissants à la porte de sa chambre firent sursauter la jeune femme. S'en suivirent des cris déchirants venus tout droit du bec du trop bavard Fÿn. Le faucon battit des ailes en restant perché sur le bout de bois maintenu dans sa volière. Ses yeux perçants allèrent de gauche à droite, puis vinrent fixer la porte comme pour essayer de voir au travers qui importunait sa jeune maîtresse en cette si douce & paisible soirée.
Goade posa son verre, calma Fÿn et se dirigea vers la porte.

- C'est à vous, ce chien ? Il traîne devant votre chambre depuis tout à l'heure et on dirait qu'il est un peu perdu...

demanda une voix sombre et grave.
Goade laissa glisser son regard vers le bas de la porte, et ses yeux butèrent sur ~~une chose blanche non identifiée~~ une jolie créature aux yeux ardoise. L'animal, couché en boule sur le seuil de la porte de la chambre de Goade, émit un doux jappement et fit cligner ses jolis yeux brillants, agitant sa grosse truffe mouillée quand Goade posa une main sur son stop.

- Non il n'est pas à moi... Mais je sais à qui il appartient, merci d'avoir prévenu.

Un sourire commercial s'afficha sur les lèvres carnées de Goade et le jeune homme repartit, tout sourire, heureux d'avoir effectué sa bonne action de la journée.
Loin d'être perdu, Hohepan -car c'était son nom, devait sûrement être en balade. Sa maîtresse ne devait pas être bien loin.
Un sifflement s'échappa de la bouche de Goade et aussitôt, Fÿn le faucon au plumage flavescent & ambré sortit de sa volière et plana jusqu'a Goade.

- Viens Hoe, on va retrouver maman.

Il ne fut pas difficile de la retrouver, d'ailleurs, la 'maman'... Le premier lieu auquel Goade se rendit fut la taverne et, Ô miracle, elle aperçut dans l'entrebaîllement de la lourde porte de bois, une douce silhouette, élancée et efflanquée, une chevelure brune foncée et une allure désinvolte... c'était bien elle.
D'un pas ferme, Goade pénétra dans le mess. Une odeur d'alcool se répandit sur elle comme une vague, c'était plutôt alléchant. Sûrement prendrait-elle un peu de cette alcool chimique trempé dans du jus de cerise, hm?
L'arrivée de la brunette se fit plutôt rocambolesque... Imaginez : vous sirotez tranquillement votre bière, et, alors que le silence du mess se fait reposant, vous entendez, d'un coup, la lourde porte du mess qui claque, des bruits de pas martelant le sol, un aboiement joyeux et grave, et un cri perçant qui vous déchire les oreilles.

- Even ?

fit-elle en se dirigeant vers la jeune femme. Et la joyeuse bande de continuer à jacasser...
Goade leva son bras et aussitôt Fÿn cessa de tournoyer dans le mess et vint se poser sur le bras ganté de sa propriétaire.
Elle s'aperçut qu'Even n'était pas seule. De dos, le jeune homme avec lequel elle semblait parler possédait une chevelure blonde tirant sur le blanc.
Un dragonnier qu'elle ne connaissait toujours pas ? Impossible, elle croisait régulièrement le chemin des dragonniers de l'Ordre.

* sale mémoire u___u *

S’aurait put être n’importe qui, il en aurait été de même de la tant reconnue générosité de Jakob. La tranquillité, la tranquillité… S’en devenait endormant et, il fallait tenir bon, venir à bout de cette épopée vers la déraison et pour cela, avant de partir vers le rêve, le trou noir était de mise, mais pour qu’il soit véritablement opaque, quelques gorgées encore étaient nécessaires. Cheminer à deux vers cette cruciale et finale étape avait quelque chose de stimulant, selon Jak. Ainsi avait-il commandé une deuxième fois, ne captant pas de suite les paroles de l’autre.

S’aurait put être n’importe qui, mais ce ne le fut point. Ce n’est qu’après avoir commandé la consommation de son « invité » que le dragonnier prit conscience de l’identité de sa compagne de comptoir. Et oh! surprise, elle l’avait elle aussi reconnu. La réputation de la demoiselle avait rendu son prénom fort connu sur l’île et ils oeuvraient tout de même dans le même domaine! Et puis… comment ne pas reconnaître cette désirable Even, petit paradis ambulant, du moins dans l’esprit tordu de quelques nombreux hommes. Et lui?
D’abord, pourquoi lui? La surprise passée, le constat fait, Jakob se questionna, à savoir ce qu’elle pouvait bien ficher là, mais finalement se dit qu’elle devait vraiment s’ennuyer, ou alors qu’elle avait probablement un truc à raconter pour l’Ordre ou… Qu’importe, ce raisonnement inutile méritait une deuxième gorgée. Surtout après ce choc, et bon sang quel choc! L’arrivée impromptue, et surtout totalement inattendue d’Even n’était pas seul facteur à justifier le regard qu’était né sur le visage de Jakob, sentir son reflet dans le regard d’un autre l’avait ébranlé également.
J’existe.
L’alcool a tendance à le lui faire oublier.

N’avait-elle pas parlé de fête? Il jeta un coup d’œil aux alentours. Bah non, de quelle fête elle parlait?

-Y’a pas de fête… Et pas de colombes non plus. Moi, j’aime pas les colombes, je préfère les dragons, tient… Répondit bêtement Jakob en portant sur Even un regard vaguement confus.

Il prit de nouveau une gorgée de son verre, oubliant du coup la dite-fête…ou plutôt imaginée. Nouveau flash de mémoire…c’était quoi aussi cette histoire d’être « [étonnée] qu’[il] soi[t] seul ce soir […] pour partager ce délicieux moment d’égarement » !? C’était quoi ça, des avances!?! Sûrement pas! Préférant ignorer la mention de « l’amie », il porta son œil unique de nouveau vers la jeune femme et reprit.

-Pour tout te dire, ils n’ont habituellement pas beaucoup de goût, ces moments d’égarement…

Il s’interrompit, la serveuse venait de quitter le comptoir, plateau vide en main afin d’aller récolter les verres et pichets vides. Pas tellement subtilement, disons assez peu pour que Jakob le remarque, elle lui avait jeté un étrange regard, plutôt contrarié.

-Regarde-là… Fit le dragonnier en la suivant un instant de l’œil, blasé, et lent. Elle attendait juste que je perde assez l’esprit pour avoir la gentillesse de m’héberger. Son plan allait presque fonctionner, surtout avec le verre d’eau. Je devais pas dormir, mais être juste assez éveillé pour être apte à me déplacer. Plutôt finir dans une poubelle que dans son lit! Déclara-t-il vivement sans porter attention à la portée de sa voix, qu’il contrôlait très peu dans le moment, mais heureusement, son sujet d’étude était assez éloigné. Il reporta son attention sur Even.

-Je disais quoi déjà…? Ah…ouais… Je ne partage habituellement pas mes moments d’égarements. De toute façon, dès l’instant où l’on n’est plus seul, on a un repère, quelqu’un que l’on fait un chez-soi temporaire pour se sécuriser, se sauver peut-être, je sais pas trop, une distraction…alors on oublie qu’on est perdu, et du coup on ne l’est plus parce qu’on est là, devant quelqu’un qui nous voit. Si on le voit, c’est qu’on est plus perdu. Je suis plus égaré parce que t’es là, maintenant… Comment je pourrais être égaré en sachant que t’es là et que tu me vois? Il la regarda, comme pour s’assurer qu’elle le voyait bel et bien puis, soudainement rieur, il plaqua sa main gauche contre ses yeux et ricana brièvement, mollement.

-Je débite vraiment des conneries d’ivrognes…des conneries…

Il dégagea sa main, la laissa tomber sur le comptoir.

-Mais c’est bien comme ça! Que tu restes… j’veux dire… que tu sois là, du moins… Arrivée, en tous cas… Y’en a marre de tourner en rond pour aller nulle part, à la fin…

Il appuya son visage dans sa main droite et plongea le bout de son index gauche dans le verre à demi-plein et se mit à faire tournoyer le liquide. La serveuse revint et se remit à une quelconque tâche. Jakob retira son doigt et se rapprocha d’Even, comme pour comploter. Sa bouche contre l’oreille de la jeune femme, il s’appuyait d’une main sur le bar et de l’autre sur le siège d’Even. L’alcool lui faisait un peu perdre la notion de « proximité »…

-Pour tout te dire, elle me fait un peu peur, la serveuse… Il afficha un sourire amusé et se redressa, s’éloignant.

Retrouvant un semblant d’énergie et d’aplomb, il parla, encore.

-Je t’ai déjà prise pour ce que tu me prends, mais finalement, en te voyant avec les autres, en t’observant, parce que oui je t’observe... Tout le temps! S’exclama Jak en ouvrant grand son oeil, exagérément, en fait. Et ben maintenant que t’es là, assise à côté de moi en me prenant pour ce que tu me prends, j’avoue que je doute.

Il soupira et s’empara de son verre afin de le porter à ses lèvres et c’est à ce moment que la porte du mess s’ouvrit et qu’une autre super-woman fit son entrée, de surcroît accompagnée d’un zoo. Sans plus s’attarder à cette insolite apparition soudaine, Jak prit sa gorgée, reposa son verre et se tut, finalement. Ses neurones avaient surchauffés, s'en suivait habituellement une certaine léthargie.

Even avala une autre gorgée et reposa son verre sur le comptoir. Le monde autour d’elle commençait à se déformer légèrement, elle avait l’impression étrange d’être en suspension dans la salle… L’impression-signal qu’elle avait assez bu. Non, elle ne s’arrêterait pas avant d’avoir finit son verre… C’était un cadeau, bon sang ! Et ne pas le boire jusqu’à la dernière goutte serait une offense à celui qui le lui avait offert, en l’occurrence l’hurluberlu qui se trouvait assis à coté d’elle. D’ailleurs, à sa droite ou à sa gauche ? Hum… J’écrit avec cette main, c’est donc la gauche. Heu, non, la droite. Mais lui, il est de quel coté ?

La jeune femme secoua la tête pour remuer ses neurones endormis et retrouver quelque peu ses esprits. Pas facile… Sous le regard courroucé de miss-j’astique-furieusement-un-verre-propre, elle posa son coude sur le bar pour appuyer sa tête sur sa main et en profita pour se mordiller les lèvres avec délectation.

-Je vois bien qu’il n’y a pas de colombe…

La serveuse astiqua encore plus fort son verre sans les quitter des yeux. Elle suivait la conversation, hein ? Quel plaisir pour Even que de provoquer ses semblables… Enfin, semblables, pas tant que ça. « Conchita » ne la valait sûrement pas au lit, quelques hommes pourraient le confirmer. Mais quelle importance ? La serveuse était derrière le comptoir, alors qu’Even se trouvait du bon coté, c’était aussi simple que cela. Pour enfoncer le clou un peu plus profond, la jeune femme reprit de sa voix inhabituellement mielleuse :

-Mais des dragons, ça…

Excédée, l’objet de son trait d’ironie jeta presque le verre dans l’évier et se dirigea à grand pas vers la même table que tout à l’heure en heurtant au passage l’épaule de la dragonnière, qui se laissa bousculer en laissant échapper un rire moqueur. Cette fille ne l’impressionnait pas le moins du monde. Elle n’avait sans doute jamais tué de singe-broyeur à mains nues, elle… Jakob profita de l’absence de la serveuse pour faire part à la jeune femme de sa pensée à son égard, et cela la fit beaucoup rire. Le mettre dans son lit, hein ? Even s’en doutait, c’état tellement évident… Et elle trouva la comparaison avec la poubelle particulièrement bien trouvée.

-Excellents goùts, seigneur Jakob ! Beaucoup d’habitués trouvent cette créature délicieuse, ce sont des imbéciles.

Sans se départir de son joli sourire, Even reprit son verre et le délesta prestement d’une autre gorgée d’alcool. Il fallait suivre le rythme de son interlocuteur ; ce n’était pas facile mais elle le ferait jusqu’au bout. Et puis… Elle en eu bien besoin lorsque le jeune homme commença à lui parler de repères, de distraction et d’autres choses diverses de façon incompréhensible. Il s’agissait alors de prendre l’air de quelqu’un qui avait saisi ces paroles et hocher la tête avec intelligence, chose qu’elle parvint sans peine à faire grâce à une gorgée supplémentaire. C’est qu’il était bien atteint, le Jakob... D’ailleurs il finit par s’en rendre compte lui-même.

Even l’écouta parler en hochant la tête de temps en temps. Oui, elle était là, et peut être même qu’elle allait rester. Pour s’amuser, boire un peu plus que d’habitude et faire enrager la serveuse… Serveuse qui d’ailleurs revenait vers eux, son plateau chargé à la main. La jeune dragonnière lui lança un petit regard moqueur et sourit plus largement à Jakob lorsque celui-ci se pencha sur elle pour lui chuchoter quelques mots à l’oreille. C’est qu’il était très proche, là, notre intrépide aventurier ! Loin de le repousser, la jeune femme l’attira discrètement un peu plus contre elle et gloussa tout en surveillant son amie derrière le comptoir. Rouge comme une pivoine, celle-ci venait de s’emparer du même verre que tout à l’heure et le frottait avec une vigueur peu naturelle. Even s’amusait comme une petite folle. Sur le ton de la confidence, elle répondit à son interlocuteur.

-Pas moi. Je pourrais te protéger si tu veux…

C’était une plaisanterie, rien de sérieux bien sûr, et Even marqua ce fait en riant une nouvelle fois. Lorsqu’il se remit à lui débiter des choses difficilement compréhensibles, elle tenta de se concentrer et finit par comprendre qu’il la prenait pour… une catin ? Une ivrogne ? Peut être un peu des deux… En tout cas c’était faux bien sûr, mais la jeune femme se consola avec le fait qu’il la regardait « tout le temps ». Tient, son verre était presque vide. Qui l’avait donc vidé ? Aucune importance. Even posa sa main sur l’épaule du jeune homme et sourit avec malice sachant que la serveuse n’en ratait pas une miette.

-Tu ne devrais pas douter. Le doute c’est l’apanage des…

Mais personne ne su jamais de qui le doute était l’apanage car la porte de l’établissement s’ouvrit soudain sur une Goade fraîche comme une rose et l’air terriblement sobre. En entendant le jappement que poussa le chien en la reconnaissant, Even se retourna pour accueillir avec chaleur son cher compagnon frétillant.

-Hé bien Hoe ! La noiraude t’as laissé tombé ? La garce… Je t’en trouverais une autre, tu verras.

Pas l’air vexé le moins du monde par la perte de son amoureuse d’un soir, le chien blanc balançait joyeusement sa queue de droite à gauche – ou de gauche à droite, ça dépend si vous êtes sobre ou pas – et accompagna d’un autre jappement enjoué l’éclat de rire de sa maîtresse. Goade s’approcha d’eux, son aigle sur le bras, et prononça le nom de la jeune femme, qui leva enfin les yeux vers sa compagne de raids.

-Hey Goade ! Tu viens boire un coup avec nous ? Ce jeune homme vient de m’avouer qu’il se sentait très seul, et qu’une seule femme ne lui suffirait pas pour cette nuit…

Il y eut un bruit de verre qui se brise. La serveuse venait de laisser tomber la choppe qu'elle nettoyait l'instant d'avant, le visage plus rouge que le sang des gazelles du désert de Kiam...

Le verre porté à sa bouche, le jeune homme aux cheveux candides inclina légèrement son visage et la pâleur de sa peau plus l'iris vert bleuté de son oeil guidèrent Goade sur son identité.
Ca y'est, peu à peu, le visage du jeune homme lui revint en mémoire mais son nom lui demeura bien loin. Pourtant, elle n'avait pas bu, elle? Si? Qui donc aurait pu mettre une goutte d'alcool dans son jus de goyave? Oui bon, elle devait être sûrement un peu fatiguée... Ces derniers temps ses journées étaient bien remplies et il fallait à présent qu'elle mette tout son temps libre dans l'élaboration du prochain raid.
D'un pas souple et de son allure chaloupée, la brunette zyeuta sa camarade et pencha la tête sur le côté, ses grands yeux empourprés scintillants à la lumière de la taverne.
Un air sérieux et fâché crispa les traits doux de son visage.

-Tu sais très bien que l'alcool te rends volage et flottante Even... Moi-même la dernière fois que je me suis fait plaisir, seuls trois verres on réussit à me rendre fugace...

Le volatile couina en battant des ailes, fixant Jakob de ses grands yeux perçants. Sûrement l'oiseau voulait-il les deux commandantes pour lui tout seul... C'était bien un mâle, ça.
Alors que le masque de pharaon durcissait le visage de Goade, un sourire, mince, vint illuminer son minois.

-Un verre s'il vous plaît... En l'honneur de ce pirate bien solitaire.

Il y avait des fois ou Goade se laissait allée à cette emprise délicieuse, bien souvent d'ailleurs... Seulement elle était rarement pompette et gardait une lucidité étrange. Malgré tout, il fallait avouer que se laisser aller à quelques douces rêveries n'était pas désagréable... C'est ce que devait penser Even qui, bien qu'étant encore assez clairvoyante pour ne pas bafouiller n'importe quoi, se laisserait peu à peu tomber dans l'abîme. Abîme délicieux, je le conçois. La serveuse, désormais couleur amarante, adopta un air outré qui était loin d'être feint. Ses yeux clignèrent quelques instants, et son regard, allant de Jakob à Goade en passant par Even, fut presque perdu et consterné.
Sans mot dire, la jeune femme attrapa dédaigneusement une choppe de bière toute neuve, la rempli d'un liquide mousseux et légèrement doré, puis la posa, dans un bruit aussi lourd que celui que la choppe de bière avait fait en tombant, sur le comptoir en face de notre brunette aux yeux d'églantine.
Un sourire mesquin posé sur les lèvres, Goade agita sa tignasse frisée et toisa Even d'un regard enchanté.

-Saoule ou non tu es toujours aussi friponne... Faire tourner en bourrique la ravissante serveuse de notre mess préféré, en voilà une bonne idée!

Un rire léger fit vibrer les cordes vocales de Goade qui se pencha pour apercevoir avec plus de netteté le visage du dît solitaire... Le jeune homme, plutôt séduisant, avait un côté assez roublard mais ce soir là, il sembla plutôt très fatigué et complétement à côté de la plaque. Ses cheveux semblaient légèrement humides et ses mouvements étaient hésitants.
Celà dit Goade reconnu immédiatement le borgne.

-Tiens! N'est-ce pas ici le dragonnier de Luzombre?

s'exclama-t-elle alors en reconnaissant le visage du jeune homme. Quelle surprise! Le garçon était le dragonnier d'un très discipliné dragon, flexible et obéissant qui avait pour coup de coeur les oiseaux. Ce ne fut pas une surprise pour Goade d'apprendre ceci car Luzombre avait eu pour bon compagnon Fÿn, le cher et tendre faucon de la belle. C'était seulement il y a quelques jours que la jeune femme avait appris que Luzombre était le dragon du dénommé Jakob en l'apercevant dans les stalles alors qu'elle passait rendre une petite visite à Goven.
Goade fut la seule à reconnaître Jakob car Fÿn lui, continuait sa crise de jalousie sans s'apercevoir que l'objet de ses tourments était le dragonnier de son grand copain.

Ah pour ça des dragons, il y en avait certainement. Ce soir même dans le mess il y avait au moins une dragonne qui, contrairement à Luzo qui gobait parfois accidentellement ses volatiles compagnons, ne ferait délibérément qu’une bouchée de la petite colombe qui astiquait, là derrière. Dupe, aveugle, tout simplement « homme », qui sait, Jak ne suivit pas la joute qui se jouait entre les deux demoiselles. Il faut dire que l’idée d’être l’objet de ce type d’affrontement féminin subtil n’était pas le genre d’idée qui passait très souvent par les esprits de Jakob.
Discours d’ivrogne passé, il en fallut de peu au jeune homme pour ne pas céder sous l’effet de sa totale –ou quasi-totale- absence d’équilibre dans le moment et littéralement tomber sur Even alors qu’ils s’adonnaient à un fort discret échange. Oh bien sur, l’accident n’aurait pas été des plus contrariant, au contraire, si ce n’est du rôle à jouer dans la scène… Disons que certains acteurs étaient mieux placés que d’autres, tout simplement!
Even la protectrice. Voilà une protection qui vaudrait de l’or. Pas étonnant que la plaisanterie dessina ce fin sourire sur les lèvres du dragonnier…

L’apanage des quoi? Il ne le sut point, mais oublia vite fait qu’il ne saurait pas, se consolant dans sa douce folie à boire, tout en méditant sur le sort des asticots. En avaient-ils terminé de son cerveau méandreux ou alors leur restait-il quelques tissus de cervelle à désinfecter?
Oh tient, en voilà un gros blanc qui communiquait avec la dragonne du paradis! Quelle chance de savoir parler l’« asticot »! Songea Jakob en observant le gros molosse aux pieds d’Even et… une autre dragonne! Goade de son prénom. Un vrai aimant, ce Jakob! À croire qu’il avait retrouvé le « bo » qui décora jadis la finale de son prénom. Ou alors ce devait être que pure fantaisie et chimère, résultat de fantasmes refoulés, d’une utopie insaisissable et inespérée d’un adolescent à la découverte du sybaritisme. Au fond, il devait être assis là, au bar, seul, enveloppé dans le brouillard de son délire intérieur, guetté par la vicieuse colombe.
Et pourtant, cet asticot géant était bel et bien là, sous ses yeux, en communication avec le monde extérieur. S’était-il échappé de son crâne? Jakob, l’œil rivé au dit-Hoe, se mit à faire mine de l’écouter, hochant la tête comme Even l’avait fait à son égard un peu plus tôt. Peut-être finirait-il par comprendre quelque chose, se disait-il. Cependant, ses quelques hochements de tête concordèrent parfaitement avec l’affirmation d’Even. Oui, semblait dire Jakob, en effet, une seule femme ne me suffit pas. Reste néanmoins que c’est visiblement le chien, qui attirait l’œil du soûlard. Mais encore…

D’un œil embrumé, il suivit les gestes de la serveuse qui servait une chope de bière à Goade. Portant plus ou moins attention aux dires de Goade à l’adresse de la dragonnière assise à ses côtés. Quelque chose clochait… Il aurait dut dire un truc avant que tout ça ne se produise… Quelque chose qu’il avait déjà dit…
Soudainement, Jak plaqua sa main contre le comptoir, se penchant vers Even et, fixant la serveuse, il s’exclama avec vivacité :

-Une autre pour mon invitée! Au compte du dragonnier de Luzombre, ouais!

Quel entrain! Et l’autre idiote qui le considérait sans joncher.

-Une autre! Une autre, une autre!

Levant les yeux vers le ciel et soupirant bruyamment de contrariété, elle s’exécuta puis posa une deuxième chope sur le comptoir qui glissa jusqu’à Jakob qui, d’une main, l’agrippa et, s’orientant vers Goade, alla pour la lui donner mais s’interrompit, constatant l’autre chope. Un moment de flottement, et finalement il posa la chope devant Goade, ignorant l’autre.

-Tiens. Fit-il d’un ton sérieux.

Quoi de plus important que le partage de l’eau-de-vie…

-Jakob Azriel. Reprit-il pour compléter sa présentation entamée précédemment. Luzombre… ouais, Luzombre… marmonna l’éméché en portant un regard rêveur sur son verre qui tranquillement se vidait. L’espace d’un moment, il crut y voir la tête de son dragon, les yeux pétillants, surexcité comme d’habitude… Il sourit.

Son attention alla ensuite vers le faucon qui, selon toute évidence, semblait en avoir contre lui. Dans un élan de…de… d’inspiration venue d’on ne sait trop quelle planète, tout en regardant l’oiseau, il loucha –intentionnellement on s’entend- en se regardant le nez ; esquisse de grimace qu’il aurait faite à l’égard d’un gamin.
Nouvelle gorgée. Ah ha, ca remettait les neurones en place! Dans le désordre!

-Je peux savoir ce que… deux dames dans votre genre font dans le coin, dans le coin… ici. Ici au bar, là ici précisément… dans mon coin, quoi. C’est pas un coin très connu et… couru, ‘voyez… Vous êtes à la chasse, peut-être? La pêche est bonne? Le gibier… est mort? Euh, mord? Fort? Haha…ha…
Bon sang ce que je peux avoir chaud… Maladroitement, et non pas sans éprouver quelques difficultés techniques, il parvint à faire tomber son manteau parterre, puis déboutonna le haut de sa chemise. Et tout en se débattant ainsi avec ses vêtements, il poursuivit. En toute sincérité… Le mot lui arracha un ricanement. J’avoue que… Encore une fois, un fou rire menaça d’être déclenché. que… qu’être dévoré par des dragonnes doit être moins souffrant que par des colombes. Il pouffa de rire puis, levant son verre, déclama : Aux dragonnes!

-Friponne ? Ha… Oui, plutôt ! Mais attend t’as pas tout vu…

Even se saisit de son verre à pleine main, le porta à ses lèvres et bascula la tête en arrière pour le finir en totalité. Puis, elle le reposa sur le comptoir et se tourna vers Jakob avant de se passer avec malice sur les lèvres une langue pour le moins suggestive… Une dragonne ? Pourquoi pas… C’était toujours mieux qu’une colombe du genre traînée qui n’avait rien trouvé de mieux pour attirer un homme dans son lit que de le faire boire, n’est ce pas ? Il y avait bien d’autres moyens tellement plus amusants… Mais pas avant que son verre ne soit à nouveau rempli. Tient, par un heureux hasard, une choppe se retrouva sans propriétaire juste devant le nez de notre deuxième dragonne, qui en tenait déjà une autre dans la main. D’un mouvement virtuose de la main, Even s’en empara.

-Hopela ma jolie ! Pour toi c’est un seul verre à la fois, hein ! Je ne tient pas particulièrement à devoir te porter sur mes épaules pour sortir d’ici…

Pour illustrer ses paroles, elle prit une gorgée du liquide ambré sans pouvoir s’empêcher de lancer un rire de gorge. Cette soirée était de plus en plus amusante. Et l’autre « colombe » qui les observait toujours, perchée de l’autre coté du bar, l’air courroucé… Quel réel plaisir que de la voir plisser le nez d’une façon exaspérée ! Enivrée par les brumes de l’alcool qui se faisaient de plus en plus présentes dans son esprit, Even se rapprocha du séduisant dragonnier qui lui faisait face et sembla boire ses paroles comme si c’était de la liqueur de vanille. Elle passait du tutoiement au vouvoiement sans s’en rendre compte, adaptant automatique la chose aux besoins de sa réplique.

-Un coin pas très couru vous dites ? Elle éclata de rire une nouvelle fois. Voila qui est très étonnant ! Laissez moi vous dire que les femmes qui ratent l’occasion de passer un moment tel que celui-ci avec vous doivent s’en mordre les doigts… Je crois même les entendre se lamenter.

Aussitôt, ses yeux volèrent vers la serveuse et s’amusèrent de la voir furieuse et prête à lui lancer la première chose qui rencontrerait malencontreusement ses doigts. Eh bien, quoi ? Comme dit plus tôt, il y avait d’autres façons autrement plus délicieuses – et plus efficaces – que celle employée précédemment par la colombe pour s’amuser un peu, et Even en connaissait pas mal dans ce rayon. De multiples escapades dans les bars de la ville jonchaient sa réputation comme l’auraient fait de glorieux trophées – ou comme des immondices, cela dépendait du point de vue. Après, il suffisait d’avoir le bon tempérament… Et le bon physique. Sur les deux plans, la jeune dragonnière possédait largement le nécessaire, alors à quoi bon craindre la concurrence ? Goade ne comptait pas. Elle, s’était sa copine, et puis elle savait très bien à quoi jouait Even à ce moment là. Pas d’inquiétude donc…

Lorsque Sieur Jakob eu la très bonne idée d’improviser un striptease, la jeune femme le contempla sans pudeur, un sourire ravi sur les lèvres. Il mettait le paquet ! Et puis, il avait raison, quelle chaleur… Even elle-même commençait à se sentir un peu mal à l’aise dans sa chemise de lin blanche, mais elle n’avait tout de même pas assez bu pour en dégrafer les premiers boutons dans un lieu clôt où se trouvaient une belle brochette de roublards libidineux qui ne rateraient pas cette occasion unique de se rincer l’oeil, même si l’un d’entre eux se trouvait être particulièrement séduisant…

Aux dragonnes ?

-Aux dragonnes ! Even leva sa choppe déjà à moitié vide, puis eut un clin d’œil malicieux à l’égard de Jakob. Et aux beaux dragonniers…

Elle but une autre gorgée, puis s’avança dangereusement vers l’objet de sa « chasse », en s’arrêtant à quelques centimètres seulement de son visage. Ses lèvres s’ouvrirent pour laisser filer un murmure audible seulement pour le dragonnier.

-Je pourrais vous dévorer, Sieur Jakob, vous pourriez alors me dire ce que ça fait…

Mutine, Even eut de nouveau un rire cristallin et se redressa lentement, certaine que ses paroles n’étaient pas tombées dans l’oreille d’un sourd.

Quelle habile flatteuse que cette Even… Se lamenter pour Jakob, ça par exemple, c’était du compliment! Se lamenter de Jakob aurait été plus juste. D’ailleurs, l’idée de causer les lamentations de quelques borgnes dans son genre courant les rues à cette heure lui effleura l’esprit. Pour finir la soirée en beauté, quelques coups de poings envoyés sur les gros nez rouges de ses confrères ivrognes faisait du bien, ça commençait bien une nuit qui s’avérait longue. Ou encore, en recevoir quelques-uns sur la gueule était une expérience assez éclairante, violemment éclairante, disons. Le réveil était infernal mais, ça valait le coup. … Cependant, ce soir, les choses étaient fort différentes. Le sortit de ses bestiales et virilement bêtes habitudes une certaine demoiselle aux manières on ne peut plus séduisantes. Une sorte de sirène des eaux aux parfums d’alcools était apparue dans la mer obscure de l’inertie de Jak. Dieux merci, il s’éviterait –peut-être- quelques ecchymoses, qu’il serait incapable de justifier de lendemain.

-Je dois être sourd, alors… ajouta t-il, goguenard.

Il cala son verre en l’honneur des dragonnes et l’abandonna sur le comptoir. Une colombe le prit en vol, non pas sans lâcher quelques malpropretés à l’actrice principale de la scène. Tout est dans le regard, à ce qu’on dit.

-Et aux beaux dragonniers… répéta l’autre en marmonnant, un paresseux sourire estampé sur le coin de la bouche.

Le goût de l’alcool manquant sur ses lèvres, il posa les yeux sur la serveuse, s’apprêtant à la héler afin de lui demander un autre verre comme le dernier, dont il n’arrivait à peu près plus à distinguer la substance, mais ses neurones engourdis furent devancés par Even et n’eurent point le temps de commander à l’appareil oral de monsieur de passer sa commande, ils retombèrent mollement sur la piste de danse muette de la tête de Jakob.
Non d’un dragon mais c’est qu’elle était proche, la gourmande! De glace, le pirate maboul ne cilla pas, se sentant lentement fondre et, franchement, les mots lui manquaient et avaler était devenu une opération davantage complexe; pauvre petite nature, c’est qu’il était bigrement plus aisé de démolir des binettes plutôt que de s’emmêler dans les filets d’une affriolante chasseresse. Mais! Il était mille fois plus enivrant de se laisser prendre à de tels jeux…

Il soupira, vaincu, mais en vérité, agréablement vaincu. Sous ce rire cristallin qui emplit ses oreilles et sa tête, entraînant les neurones apathiques de la piste de danse à entrer dans une transe ensorcelante. Sa chemise, il l’aurait définitivement enlevée, mais la déboutonner avait atteint une complexité… déconcertante. Sans gêne, c’est vers Even, tout entière il faut le préciser, que le regard de Jakob s’orienta. La pudeur n’avait plus de sens, au contraire, ce sont ses sens qui guidaient ses gestes. Une barrière s’était effondrée et s’ouvrait sur une voie encore inexplorée. Enfin, disons que, contrairement à l’habitude, Jak sautait moins rapidement aux conclusions…

Le désir. Celui de la chaire et de s’y abandonner en laissant toutes pensées derrière, plus de conscience, comme avant de sauter dans le vide. Je vais mourir, c’est inévitable, mais je m’en fiche. Là bien entendu, la question de vie ou de mort ne se posait pas, du moins j’espère, mais c’est à un Jakob sensations et non pensant que Jak voulait s’abandonner.
À son tour, il alla vers Even, s’adossant nonchalamment contre le comptoir, et donc se tournant complètement de dos à la serveuse. Il s’approcha suffisamment de la dragonnière pour que leurs visages soient à quelques millimètres près d’être face à face, s’interposant à demi entre le bar et Even. Tout autour était devenu intangible, flou, comme plongé dans le brouillard.

-Allez donc, mademoiselle, je vois ma fin venir et… je sens votre appétit grandir. C’est que… je ne voudrais pas vous faire attendre, ‘voyez…

Le vouvoiement était-il tant de mise? À son tour le jeune homme l’avait adopté, signe qu’il s’était laissé prendre au jeu. Un demi-sourire sur les lèvres, la tête légèrement inclinée vers la droite, son œil alla des yeux de la demoiselle à son nez, à ses lèvres.

-Pas de chance, fit-il en détachant son regard, non pas sans hésitation, de l’invitante bouche de la dragonnière, j’aurais aimé goûter…aussi… un peu de dragonne...

[désolé, pas super on dirait... je doute

avis aux jeunettes qui voudraient jouer les entremetteuses, ne vous gênez pas hein! ^^' ]

Nouveau Dragonnier Nombre de messages : 8 Date d'inscription : 16/10/2007

La serveuse, mal en point

*Bon dieu... qu'ai-je mérité pour assister à une scène pareille...*

-Jakobo! Jakobo, tu...

C'était sorti tout seul, PAF! Son ton, sous la pression et sa colère retenue, avait été très autoritaire. C'était limite si elle n'avait pas hurlé son nom dans tout le mess. Il fallait qu'elle trouve vite un moyen d'arrêter cette abominable scène qui se déroulait devant ses yeux de merlan fris. Elle avait beau taper du pied, cogner les chopes de bière contre le comptoir, les envoyer avec fureur aux autres occupants du mess, rien n'y faisait, cette satanée midinette continuait son one woman show à la façon d'une comédienne sur le devant de la scène, en laissant l'impression qu'elle avait fait ça toute sa vie. Quelle honte pour notre enjôleuse serveuse! Sa réputation était en jeu. Jamais aucune proie digne du nom de Jakobo ne devait lui résister. Elle était d'autant plus humiliée car, sous ses yeux, la femme au chien blanc semblait bien plus expérimentée qu'elle. Hein! Quoi! Non, pas possible.
Notre nymphette aux yeux de beurre noir se cambra, bombant la poitrine et mêtant en valeur ce qu'il lui restait d'atout féminin. Rejetant sa tignasse blonde en arrière, elle voulu tenter le tout pour le tout. La comestible dragonnière n'aurait plus qu'a aller se rhabiller. A moins que ce soit Jakob qui aurait besoin de le faire... C'est avec horreur que la serveuse considéra le jeune homme, que désormais rien ne pourrait arrêter. Il avait déboutonner le haut de sa chemise! Bon dieu, c'est dans le lit d'une autre qu'il allait finir.

-Un autre verre peut-être? susurra-t-elle d'une voix de colombe, tiens, espérant que l'attention du beau borgne se retourne vers elle. Son ton de voix fut toutefois très désespéré et c'est avec une moue de chien battu qu'elle zyeuta le beau pirate. Ton desespéré et furax. Une sorte de haine sauvage et un peu ringarde sortait de sa petite voix écrasée. Son visage, écarlate, laissait presque paraître un cerveau mou en ébullition. Cerveau dont les rouages cliquetaient sous l'effort. Celà faisait un bout de temps qu'elle n'avait pas fait agir autant de neurones en même temps pour résoudre un problème. D'habitude, elle n'avait besoin de rien pour amener dans son lit les guignols ivres de la taverne. La pauvre femme s'ingéniait rarement à trouver comment parvenir à ses fins. Rarement, avant ce soir. Méchante dragonnière, méchante. Pour la peine, elle leur coupa la parole. Et toc! dans les dents.

[J’ai vu mieux, comme entremetteuse… x)]

L’instant était délicieux. Plongée dans une brume épaisse et entourée de lumières tremblotantes, Even avait réduit son univers à l’homme qui lui faisait face. Elle n’avait plus vraiment conscience du reste, toute son attention était focalisée sur les réactions et les paroles de son interlocuteur. En tournant la tête quelques instants plus tôt, elle s’était aperçue que Goade avait filé, emmenant avec elle son aigle et Hohepan. Tact ? Peut être bien. Even n’y avait pas réfléchit plus de quelques secondes. Son verre était vide depuis pas mal de temps déjà, mais elle savait très bien que si elle en sifflait ne serait-ce qu’un autre, son corps n’arriverait plus à rien faire… Et elle ne pouvait pas s’en passer, surtout pas maintenant.

Son murmure avait produit l’effet escompté : Jakob semblait avoir mordu à l’hameçon, et son soupir imperceptible confirma à son interlocutrice qu’il rendait les armes. Mais le jeu n’était pas finit, loin de là… Justement, le plus intéressant viendrait plus tard. Pour le moment, ils en étaient juste à l’ouverture. Après un moment de réflexion, durant lesquels le jeune homme paraissait avoir digéré les paroles de la dragonnière, Jakob se rapprocha à son tour de cette dernière, comme elle l’avait fait quelques secondes auparavant.

Comme pour le tenir à une distance raisonnable de son visage, Even posa une main sur la poitrine du pirate ; c’était un prétexte pour le toucher, une autre façon de se rapprocher de lui. Les yeux ne quittant pas les siens, elle joua malicieusement avec les boutons du haut de sa chemise et frôla la base de son cou avec le bout des ongles. Jakob venait d’entrer dans la danse. C’était assez agréable de le sentir si proche d’elle, juste à quelques millimètres… Lorsqu’il parla, l’odeur de l’alcool se fit encore plus présente autour de la jeune femme, qui accrocha un sourire mutin à ses lèvres sans arrêter de tripoter le col de lin qu’elle tenait entre les doigts.

-Vous êtes bien téméraire de vouloir goûter à la chair d’une dragonne, monsieur le pirate. On dit qu’elle est empoisonnée… Et beaucoup s'y sont cassé les dents. Even baissa les yeux sans cesser de sourire. Mais si vous avez le courage de prendre le risque, je…

Elle fut alors coupée par la colombe vulgaire qui, de l’autre coté du comptoir, venait de prononcer le nom du jeune homme d’un ton qui ne plu pas du tout à Even. Cependant, cette dernière ne put s’empêcher de rire doucement : "Conchita" ne pourrait rien arrêter maintenant, Jakob était juste à point… Enfin, pas tout à fait. Ignorant la tête furieuse de sa rivale, Even retourna la tête vers son pirate et replongea ses yeux dans les siens pour l’empêcher de regarder l’autre morue. Il ne fallait pas qu’il détourne son attention maintenant…

-Il se pourrait que je vous laisse faire. Elle laissait courir ses doigts sur le haut de la poitrine du jeune homme. Mais peut être que… ici… Sa main descendait maintenant le long de son torse, caressant les boutons un à un. Ce ne serait pas très… La main baladeuse venait d’atteindre la ceinture du dragonnier…Correct.

Even retira sa main, et se mit une nouvelle fois à rire de sa voix claire, qui fit tourner quelques têtes vers eux. Bien des hommes auraient aimé être ainsi traités par la dragonnière, et certains regardaient maintenant le couple avec intérêt. Logeant un bras hardi dans le dos du beau dragonnier qui se tenait toujours contre elle pour l’empêcher de reculer, si l’envie lui en prenait – chose pour le moins improbable – la jeune femme pencha la tête sur le coté et rapprocha ses lèvres d’une oreille qu’elle pensait attentive à chacun de ses mots.

-Nous pourrions…
-Un autre verre peut être ?

He bien jolie serveuse, on ne supporte pas la défaite ? Even se recula à peine assez pour lancer un regard provocateur à la jeune femme qui venait de les déranger une nouvelle fois et sourit largement pour lui faire comprendre que cette interruption ne nuirait en aucun cas à ses plans. Cette jeune personne manquait cruellement de talent, et ne semblait compter que sur sa poitrine généreuse et son tonneau de bière tiède pour attirer les hommes dans ses filets. Qu’elle apprenne en silence, bon sang !

-Je ne crois pas, non. « Jakobo » ne serait plus très vaillant avec un verre de plus, n’est-ce pas ? Ce serait tellement dommage…

Avec un autre regard appuyé à la pauvre colombe dépassée, Even se retourna encore une fois vers son homme et sourit avec une timidité feinte avant de répéter :

-N’est ce pas ?

Il devait choisir maintenant. Si il reprenait un autre verre, Even s'en irait en le laissant seul face à sa bière. Dans ce cas, même la serveuse à poil n'aurait rien réussi à tirer de lui. Cependant, si il désirait Even autant que le laissait entendre son attitude, le beau pirate abandonnerait pour un soir son dieu alcool et l'emmènerait sans doute la où elle voulait qu'il l'emmène...

[pamela version enelienne hein, trop cool. xD]

Délicieusement orchestré par une cheftaine des plus habiles que cette partie de chasse à l’homme. Résultats d’une expérience acquise à force de nombreuses tentatives? Ou alors était-ce la proie qui se montrait trop docile? Hmm.. Peu importe, la danse allait bon train, la finale serait sans doute grandiose. Plus rien pour s’entremettre entre les deux artistes, le monde était à eux, et que pour eux. Et quelle gentillesse de la part de mademoiselle la piratavore que de venir au secours de Jakob en l’aidant à se dévêtir. Enfin, laisser croire qu’elle le ferait… Cela par contre, était cruel! Comment ne pas frissonner au contact de ses doigts contre sa peau? Comment ne pas sentir la hâte s’immiscer dans ses veines? Il fonderait oui, et s’il en avait eut la vigueur, peut-être n’aurait-il pas sut patienter avant d’avoir sa bouchée.

Le cou tendu vers l’avant, pressentant l’invitation d’Even pour une dégustation, si mince soit-elle, Jakob se vit troubler par une voix lointaine, oubliée déjà depuis de longues minutes, une voix dont il ne souhaitait absolument pas se souvenir en ce moment et, qui plus est, l’avait interpellé, lui, d’une façon qu’il abhorrait. Il en grimaça. C’était comme un grincement hideux à ses oreilles. Ce « bo », ce « Jakobo », avait quelque chose de détestable et d’absolument faux, même pour le plus soûl des borgnes. Une fausse note, déjà c’était de trop, et cette unique fausse note dans cette symphonie des sens menaça de briser le duo.
Jakob, irrité par la syllabe gâtée de son prénom, alla pour tourner la tête vers la serveuse. Il n’avait aucune idée de ce qu’il lui dirait, ou ferait, mais chose certaine, lorsqu’il entreprit ce mouvement ralenti, il n’avait aucune bonne intention.
Heureusement, une super-héroïne vint à la rescousse du pirate suicidaire et le sortit du piège de la blondasse morue. Encore une fois, il y avait ces doigts sur sa poitrine qui, en prime, se mirent à explorer les lieux de façon peu pudique. La morue? Oubliée.

Tout œil, tout ouïe et tout au complet concentré vers Even de nouveau, et surtout vers les gestes de cette dernière, Jakob prévoyait la suite et, c’est avec un regain de zèle qu’il projetait la posséder.
Un parfum familier, mais dont il ne se fatiguait point, emplit ses narines lorsque la dragonnière se rapprocha pour lui parler à l’oreille. Fermant l’œil pour mieux sentir et ressentir la proximité de l’autre, à son tour il rapprocha le côté de sa tête contre la sienne, se pressant encore davantage contre la jeune femme.

Encore une fausse note. Cette fois-ci cependant, la musique jouait trop fort dans la tête de Jak pour qu’une quelconque intervention ne le dérange. Ne me dérangez pas, je suis profondément occupé (-Saint-Denys-Garneau). Ainsi s’exprimait la note qui décorait la porte de la tête du dit-beau pirate.

Ce serait du gaspillage, oui, que de rendre complètement inapte celui qui s’avérait, et ce de plus en plus, tout à fait apte à de bien étonnantes choses. Mais attention, la suite, c’est dans un milieu autre, un univers au décor différent, qu’elle se déroulerait, et le temps était venu de sortir de scène, pour aller jouer ailleurs.

Cette fois, le tour de conduire la danse revenait à Jakob. Non pas sans regrets, il se redressa, retrouva quelques esprits qui lui seraient fort utiles pour retrouver son chez lui et, pour toute réponse à l’adresse d’Even, il lui prit la main et, sans un regard pour la serveuse –quelle serveuse?-, il prit la direction de la sortie, entraînant sa partenaire avec lui. En route pour le septième ciel…

[xD y fallait trop... mais bon, la suite c'est quoi?

]

[La suite c'est ici. La serveuse pourrait répondre là pour cloturer, ça pourrait être drôle ^^]

Nouveau Dragonnier Nombre de messages : 8 Date d'inscription : 16/10/2007

[Bon ben comme dû, je réponds x)]

La détresse de notre serveuse abattue augmenta de quelques degrés. La féroce dragonnière l'ignorait? Qu'elle l'ignore! C'était au pirate qu'elle s'adressait. Mais la main trop baladeuse de la tendron continuait son chemin, douce et provocatrice face à la blondinette derrière son comptoir -qu'elle aurait voulu casser pour aller rejoindre nos deux tourtereaux et leur apprendre ce qu'était le respect, bon sang!- et celà ne contribua pas à redonner à notre fiévreuse amie sa couleur naturelle.
Serrant la mâchoire, la barmaid devisagea longuement la dragonnière. Crispant ses mandibules qu'elle était prête à enfoncer dans le cou de la cosette, elle faisait crisser ses dents dans un bruit de craie griffée sur un tableau noir. La pinte qu'elle tenait entre ses doigts devint chaude bouillante sous la pression de ses mains. Sans les quitter des yeux, elle posa la choppe flambée dans un rebord de l'évier, manquant de la ficher par terre à plusieurs reprises. Dans un geste vif elle en attrapa une autre, arracha le chiffon posé sur le bec de l'évier et astiqua d'un mouvement oppressé et tendu la vaisselle.
Sa deuxième phrase eut -ENFIN- pour effet de faire taire dâme la dragonnière.
Un petit sourire vile étira ses traits et elle constata avec délectation la réaction de la demoiselle au teint de pêche.
Comment se permettait-elle de répondre à la place du jolie borgne? Il avait une langue, n'est-ce pas? Se rapprochant pas à pas du couple serré, elle rejeta sa toison blonde sur ses épaules, balançant le chiffon sur son dos, un petit rictus satisfait sur le bout de ses lèvres roses, s'attendant à une réponse favorable de la part du délicieux fripon. Au point de chute ou il était, il ne refuserait sûrement pas un énième verre! Il n'était sûrement plus conscient de ses faits et gestes et ne serait même pas capable de satisfaire à son chevet nonne Even...
A son plus grand damne, il ne répondit rien. Hébétée, la serveuse afficha une moue grimaçante, honteuse de sa première (?) défaite. Son ex-future conquête venait d'emporter l'acerbe muse morbide vers la sortie... Tant pis! Il ne savait pas ce qu'il râtait. Et s'il croyait pouvoir monter au septième ciel avec cette... cette... ce serpent ambulant! il se trompait. Redressant le menton d'un air fier et pincé, elle détourna le regard avant que le couple quitte le mess, retournant à ses occupations de maritorne...
Elle remplit quelques choppes de bière, les attrapa et, contournant le comptoir d'une démarche faussement assurée, trottina comme un chevreuil vers la table du fond d'ou quelques vieux saoulards la hélaient sans cesse.
Prête à tout pour se venger, elle fit quelques aller-retour accompagnée de plusieurs bouteilles d'alcool fort et à la fin de la soirée, emporta quelques bons hommes éméchés dans une chambre à l'étage, songeant férocement à sa future revanche auprès de sieur Jakob.